jeudi 13 décembre 2012

Tape-cul et parc Hustai

3 août 2012

Ca fait tout drôle en se levant de ne rejoindre que des français à table.

Journée en voiture pour rejoindre Hustai, parc national où on été réintroduits des chevaux de Przewalski. On rejoint la route du 1er jour, dans l'autre sens, toujours aussi tape-cul. C'est marrant de voir ce qu'on a vu au tout début et qu'on ne voit plus pareil. Je repense à Ash qui nous avait dit que c'était de plus en plus beau. C'est vrai que la vallée est bien plus jolie. Les vastes plaines vertes font place à des étendues plus désertiques. Nous nous arrêtons à Khogno Khan pour manger, des mongols nous tombent dessus pour nous vendre un tour de dromadaire. Là comme ça, avec cette chaleur insupportable, ça me fait tout sauf rêver.

L'ambiance dans la voiture est pesante. On ne monte plus à cheval donc le séjour est fini pour certains. Cette mentalité me dérange et me fait me sentir prête pour partir tout seule.

Arrivée au parc Hustai. Les chevaux de Przewalski, sauvages, passent leurs journées dans les montagnes et redescendant en fin d'après-midi. On espère en voir mais on est sûrs de rien, d'autant que le parc est immense. Une marmotte qui se cavale, des sortes de criquets qui nous sautent dessus, des traces de sabots, mais toujours pas de chevaux. On en aperçoit enfin un, il descend au trot, s'avance et vient jusque très près de nous. A une vingtaine de mètres. Il est rejoint par trois autres. De vrais petits chevaux de peintures rupestres. Ca c'est de la chance ! 


Dernier campement à installer à la lisière du parc. La nostalgie, déjà là, se repointe. Je crois qu'on est devenues imbattables en alignement non prémédité de tentes.















On se dit dernier banc nocturne. Même plus on va loin, là on pisse en ligne, devant les tentes, 1...2...3 histoire d'être synchro. Papotage au clair de lune accompagné de nos fous rires habituels.

Voilà ce qu'on s'est dit: la Mongolie, c'était un rêve, on l'a réalisé.


mercredi 12 décembre 2012

Dernier jour sur mon petit cheval mongol

2 août 2012

Me voilà prête pour mon dernier jour à cheval. Enfin... prête, habillée quoi. Parce que c'est un sentiment très étrange. Et bien que je n'aie pensé qu'au moment présent pendant ces jours en Mongolie, je ne peux empêcher le pincement au coeur en me disant que c'est le dernier matin où je prépare mon petit bai pour une journée "de nouvelles aventures".
Il fait déjà très chaud.

L'allure est rapide, on fait deux bons galops ce matin. Dembe toujours là. Comme c'est devenu une habitude, on chante la chanson qu'il nous a apprise avant chaque départ au galop. Je savoure. A nouveau la steppe sans fin, à nouveau cette liberté incroyable, à croire que rien ne peut m'arrêter, même pas le temps qui file et qui me forcera bien à descendre.
On croise un nomade avec qui on fera un bout de route. Des fourmis volantes coriaces aussi. On est envahis.

C'est insupportable, elles sont des dizaines à nous tourner autour, à se poser, à ne pas bouger lorsqu'on cherche à les virer. Pire encore, elles se cavalent sous mon t-shirt. C'est atroce !




On laisse notre ami en route qui amène des chevaux pour un raid et continuons seuls. Je suis devant pour trotter, même pas peur d'une embardée ! Il m'aura quand même fallu 10 jours pour avoir totalement confiance en mon petit cheval. On s'accorde vraiment bien tous les deux aujourd'hui.
On quitte la terre ferme pour s'aventurer sur de la moquette flottante. Un sol détrempé si bien que les plaques d'herbe bougent lorsqu'on marche dessus. Passage d'une rivière où mon petit bai a moins pied que les autres et où mes chaussures font du sous l'eau. Je tiens à dire que je suis super contente de mes chaussures, parce que mes pieds sont restés au sec.



On croise des yourtes, des poulains attachés pour la traite de leurs mamans, un immense troupeau de chèvres. Les nomades se moquent en m'appelant "mè", Boldo dit qu'il faut trouver ma jumelle. Ash appelle "Anaïs", une grande chèvre noire se retourne et nous regarde. Me voilà !
On s'enfonce dans un bras de plaine pour 10mn de galop avant de rejoindre le camp de midi. Les plaines sont des terrains de jeu. Mon petit cheval est plutôt claqué, il galope tranquille avec les derniers et les tchou n'y feront rien. Quand j'arrive, Dembe et Boldo rigolent parce que je suis arrivée 3ème en partant de la fin, c'est vrai que ce n'était pas dans nos habitudes d'être dans le peloton de queue. Tant pis, on prend notre temps, c'est ça aussi la Mongolie. 
On revient sur nos pas, je suis devant à faire la guide au petit trot. Quelle classe !
Ce matin, les nomades insistent beaucoup pour qu'avec les filles on vienne auprès d'eux à cheval, ce qu'on fait habituellement et naturellement. Mais là, Boldo me prend la main, me dit au revoir, je lui dis non, demain, on a encore la soirée à passer avec eux. 

A midi, les deux camions sont de l'autre côté de la rivière mais c'est trop profond pour qu'on puisse les rejoindre. Ils trouvent un passage à gué et viennent jusqu'à nous. Ca passe mais on se demande comment. En descendant de cheval, je me rend compte que mes genoux sont rouillés. Je les ressens enfin les 10 jours à cheval. Autre chose me frappe: la chaleur ! Il fait horriblement chaud, on s'agglutine près du camion pour avoir un minuscule coin d'ombre, les bouteilles d'eau descendent à toute vitesse.
Il y a des pierres cervides, qui marquent les tombeaux, mais je suis trop fatiguée pour aller les voir. Petite sieste la tête sous la fourgonnette avant de repartir pour 2h qui me semblent bien rapides. On s'arrête au coude que forment l'Orkhon et la Selenga.

Quand on descend de cheval, je ne pense pas que c'était pour de bon. Je dis à Ash que si j'avais su, j'aurais attendu un peu et serais descendue différemment. Il glisse un mot aux nomades et on remonte pour un dernier aller-retour de galop. On y va plein pot. Mon petit cheval des steppes a retrouvé toute sa pêche. Retour à fond de cale avec Dembe à mes côtés. Je me répète, mais ces moments sont magiques, on a juste à filer, insouciants, libres.
En mettant pied à terre, on apprend que les nomades repartent. "Quand ?" "D'ici 15mn". Ces mots me frappent de plein fouet, je me les prends dans la gueule. Ash m'explique que les chevaux de Dembe n'ont pas été vus depuis quatre jours, que chaque jour en plus est une distance plus longue à parcourir pour tenter de les retrouver. Je trouve la réalité un peu trop brutale. Je suis pleine de colère. C'est vrai qu'ils ont beaucoup téléphoné hier, ils savaient forcément qu'ils ne pourraient pas rester pour la soirée. Et Ash ne nous a rien dit. Je comprends mieux les bayartla de ce matin. Les larmes me montent aux yeux et j'ai une boule dans la gorge quand je m’assieds pour grignoter des cacahuètes. Les 10 jours forts qu'on a passé auprès d'eux méritent mieux qu'un au revoir comme ça. Je crois que Dembe l'a remarqué. Il sort son deel, prend le chapeau d'Ash et "Anis". Il m'habille et me propose de faire une photo à cheval. Mon petit bai est attaché et entravé donc je monte sur un autre, c'est dommage, mais c'est une jolie intention. Boldo me donne une mèche de crins de ce petit cheval qui m'aura portée toute cette aventure. Dernière photo de groupe. C'est l'heure de se dire au revoir.


Bagi arrive en pleurant. Quel homme ce Bagi, touché, touchant. On s'effondre d'un coup. Dembe nous fait une bise, j'ajoute une accolade. On ne dit jamais au revoir comme on le voudrait, je ne voulais pas d'un bête au revoir. Avec Marie-Astrid, Céline et Jeanne, on s'était dit qu'on leur chanterait la chanson des éleveurs à leur départ, que ça serait un joli clin d'oeil, et on était fières de leur montrer comme on la connaissait bien maintenant. On démarre mais pas bien en rythme, Dembe nous accompagne mais on pleure tellement qu'on n'arrive pas à chanter.
On attend de les voir partir pour de bon. Les yeux toujours pleins de larmes. Avant de monter à cheval, Dembe revient vers moi et me redit au revoir. Pas aux autres. Je suis incroyablement touchée par son geste.
Ils s'éloignent. C'est la magie des rencontres, elles se vivent dans l'instant et ce côté éphémère les rend peut-être plus belles. Mais je n'aime pas voir les gens partir. Et ces nomades, qu'à moins de revenir, je ne reverrais probablement jamais, non plus.



On monte sur la colline face au camp. J'ai envie de voir une dernière fois cette immensité. Et le soleil se couche en plus, ça promet d'être beau.

 

Pendant le repas j'ai le regard dans le vide, je suis triste. "Tu peux revenir quand tu veux. Ils seront toujours là". Je sais bien, mais là maintenant ils ne le sont pas, et ça fait tout drôle après ces journées de rires. J'espère ne jamais oublier leurs rires. Je repense à la première soirée timide en leur compagnie, comme ça me semble loin.



mardi 11 décembre 2012

Un bain de souffre

1er août 2012

On galope beaucoup ce matin, Dembe est à côté de moi tout le long. Il s'assure que tout va bien, c'est adorable. Mon petit cheval se tient nickel, posé. Le rythme du trek se fait ressentir, il est sûrement un peu fatigué lui aussi. En tout cas, sa chute semble derrière lui.
Passage par chez Boldo et Dembe, on s'arrête peu de temps. La chatte que nous avions croisée chez eux le jour du dépeçage du bouc a mis bas. Un seul des petits est vivant mais ne semble pas bien en forme. On passe un moment à essayer de le faire têter, en se disant que c'est inutile, s'il ne le fait pas tout seul il ne survivra pas. C'est difficile pour moi, de laisser faire la nature.
On se remet en route. Chez nous les vaches regardent passer les trains, ici les yacks observent les cavaliers.




On passe un mini gué au galop, je suis derrière Boldo, son cheval m'envoie le pâté de boue qu'il avait sous les sabots. J'en ai partout ! C'est bon pour la peau non ? Les nomades se moquent de moi.
On arrive peu de temps après à un endroit le long de la rivière, super joli, une petite colline, deux trois arbres perchés, le soleil éclaire le vert de l'herbe et la fait paraître un tapis tout doux: on se croirait dans la Comté ! On établit le camp ici.

Après manger, direction les sources chaudes. Le temps se gâte, des nuages noirs apparaissent en moins de 2. On marchera sous la pluie et dans le vent pendant 1h30. Le terrain est trempé, les chevaux glissent, mais la bonne humeur est toujours là. Les forêts de pins nous entourent, le chemin sent la coriandre.
En arrivant, surprise ! Je m'attendais à des bassins en extérieur, en pierre... Eh non ! Des baignoires dans un chalet en construction et une trempette de 20mn dans une eau riche en souffre. Ca sent la future exploitation touristique qui n'a rien de mongol. Quoi qu'il en soit, une eau brûlante, un vrai bain, un vrai shampooing, je prends. Et pour le cadre, tant pis, j'en prends déjà plein les yeux tout le temps.
On revient au camp vannées mais propres et bien. J'ai malgré tout un petit noeud dans le haut du dos que la chaleur n'a pas fait disparaître.
Séance massage par Bagi. Il repère mon noeud, s'y attarde avant de me prendre le visage dans les mains et de me demander de quel côté je suis tombée. J'ai le droit à une sorte de magnétisme, il m'explique qu'il veut soulager les tensions et rééquilibrer les points au niveau de mon visage. Je suis bluffée par son ressenti.

Avant de dîner, on décide de passer par la ville voisine avec les nomades qui vont régler un souci chez la famille de Telma, le jeune yackier. Voyage remuant ! La ville semble sortir de nulle part, des routes en terre, des hautes palissades de bois, des constructions. C'est marrant, la maison est aménagée comme une yourte.
On passe acheter de la vodka pour ce soir. Le trajet du retour n'est pas plus reposant qu'à l'aller. Elles passent partout ces petites fourgonnettes russes !

On est toutes crevées mais on fait un effort pour rester après manger. Finalement, ça n'est plus un effort, la soirée est très très sympa. On est entre nous, on chante (des refrains, parce qu'on ne connaît toujours pas de chansons entières), on boit de la vodka qui revient encore plus vite que d'habitude. Bagi me masse à nouveau.
Tout le monde va se coucher sauf Jeanne et moi qui restons avec Dembe et Boldo. On a soudainement toutes les deux envie d'un banc ! On ne marche pas très droit jusque derrière la camionnette, Dembe va chercher quelque chose pas loin des tentes et nous croise le cul en l'air. Fou rire toutes les deux. On reste comme ça un moment, à se dire qu'on est bien. Il en faut peu pour être heureux, n'est-ce pas !
Retour à table où Boldo et Dembe nous prête leurs deels. J'enfile celui de Dembe, je n'avais jamais vu qu'il en avait un. Il a l'air très joli d'ailleurs. Et je n'ai plus froid. On reste encore un peu puis on file se coucher. A ce moment là, on ne sait pas encore que c'était notre dernière soirée avec eux.