vendredi 30 novembre 2012

"Elle descend de la montagne à cheval" (bis)

31 juillet 2012



Tout est embrumé ce matin, c'est magnifique.
Et il me manque une chaussure au réveil ! Boldo et Dembe l'ont piquée hier soir, après que je sois allée dormir. Toujours une blague en stock !
Aujourd'hui on plie bagage. C'est la fin de notre vadrouille dans le parc Naiman Nuur, on retourne dans la vallée. On reprend nos habitudes de démonter le camp avant de nous mettre en route. Ils étaient agréables ces matins où seul le petit-déj précédait le cheval. D'ailleurs, c'est la première fois qu'on nous invite à prendre un petit-déjeuner consistant. Apparemment on va avoir une matinée chargée.
Je repense à la route pour monter jusqu'ici, à quel point elle était déjà trempée et glissante, à la grêle qu'il y a eu hier. Je n'ose pas imaginer la descente. Descendre c'est toujours pire que monter. Heureusement, on n'emprunte pas le même chemin, les pentes sont moins raides mais on passe tout de même quelques heures penchés en arrière, plein les cuisses et plein les genoux.
Une fois en bas, on s'installe pour manger. Je n'ai déjà rien pu avaler ce matin, pareil ce midi. Je pense que j'ai l'estomac secoué de ma chute hier. On repart, de nouveau dans les steppes, on va pouvoir regaloper, et on en a tous envie. C'était sans compter sur ma tête qui commence à tourner dès le trot. J'ai l'impression d'être en guimauve et suis nauséeuse. Je n'ai pas envie d'emmerder mon monde, mais je ne veux pas risquer une nouvelle chute. Anne me donne de quoi passer le mal de coeur et je laisse tout le monde repartir tandis que je continuerai au pas avec Ash, en suivant le chemin des yacks, le temps que je retrouve mes esprits. Discussions agréables, il me parle de la boîte de tourisme qu'il monte, des saisons en Mongolie, de sa vie à Paris, de sa relation amoureuse... On se balade parmi les fleurs et quelques arbres, c'est bucolique ! 
En débouchant dans la steppe, on aperçoit Dembe qui vient à notre rencontre à moto. Ils sont arrivés chez les yackiers et il vient voir si je vais bien et s'il y a besoin de me conduire là-bas. Comme il a fait le chemin pour venir jusqu'à nous, je demande à Ash si ça ne le dérange pas que je rentre avec Dembe. Encore une fois, en arrivant aux yourtes, je suis l'attraction ! Mais tout va mieux. 


Dans la soirée, on joue au volley, au béret, beaucoup de fous rires. Boldo et Dembe veulent nous refaire boire ! La nuit tombée, ils nous emmènent à moto chez des voisins plus éloignés que d'habitude. C'est l'occasion de courses, de traversées de rivière mal négociées, de "woohoo", de rires encore. La redescente sur terre est assez brutale quand on entre -du pied droit, plus besoin d'y faire attention- dans la yourte de la famille du plus jeune des yackiers. Pas de sol, l'herbe sous nos pieds, peu de meubles, pas d'électricité. Je me sens gênée de venir boire chez eux. C'est fou, ces gens n'ont rien et t'offrent tout. Une grande leçon d'humanité, à l'image de tout le séjour. L'hospitalité, la générosité et la prévenance des mongols sont exemplaires. J'ai même le droit à une potion magique ! Je tousse un peu, mal à la gorge que j'ai dû chopper avec cette baignade (quelle brillante idée ce fut !), la femme m'offre donc un bol d'une mixture à base de yack vodka et d'une espèce de gras conservé dans la panse d'un bouc. Une mare jaune et huileuse flotte à la surface de mon bol. Ca fait froid dans le dos. Allez ! J'avale ça, c'est immonde, j'ai l'impression de boire de l'huile. L'alcool a le mérite d'anesthésier ma gorge et l'huile de déposer comme une barrière protectrice (on se croirait dans une pub...). Je sens déjà que ma gorge s'adoucit. On ne traine pas trop, on sent que Dembe et Boldo ne veulent pas non plus abuser de la gentillesse de cette famille qui a déjà été plus que merveilleuse.
Retour à moto. Paraît qu'on nous entendait rire du camp.


























A nouveau, les mésaventures de la journée me semblent bien loin.


Lac de Shireet

30 juillet 2012

 

Ce matin, traite des yacks chez nos voisins avant le petit-déjeuner. C'est compliqué d'aller vite ! Les yacks sont des bestioles étranges. Je m'attendais à un cri ressemblant au meuglement des vaches, finalement, ça s'apparente plus au grognement d'un cochon.
Le soleil est super agréable, tout est ensoleillé et ça change tout le paysage.

 

Une fois à cheval, on rabat le troupeau de yacks vers un autre pâturage en poursuivant notre route pour le lac de Shireet. Encore un peu plus haut dans la montagne, des montées raides, puis un petit bout de clairière. Dembe nous cueille des fleurs, nous fait goûter de la ciboulette sauvage. Il tape sur ma bombe aussi, se moque de la grosse tête que ça me fait !
La descente vers le lac est raide et trop glissante, on met pieds à terre. Pas facile de partager l'étroit chemin avec un cheval qui glisse et ne pense pas à la place qu'il te laisse. On arrive en bas, sur les berges du lac, c'est magnifique. Et en plus il fait beau. On essaie de pêcher du poisson pour ce midi mais en vain, encore une fois. Je vais finir par penser que les mongols sont doués pour tout sauf la pêche !





 On profite du beau temps pour aller se baigner. l'eau est méga fraîche, mais se baigner à plus de 2400m d'altitude: fait. Et séchage dans les dels gentiment prêtés pour pouvoir remettre nos fringues sans les tremper.



L'après-midi = retour au camp par un autre chemin. Et surtout, l'après-midi = grosse frayeur.
En remontant à cheval, je ne me sens pas bien, j'ai le ventre en vrac, peut-être dû à la baignade un peu trop fraîche. Tout le monde plaisante, comme d'habitude, se lance des pommes de pin... Mais moi je ne suis pas dans le coup, j'ai la tête qui tourne un peu. Je prends sur moi et espère que ça passera vite parce que c'est le genre d'état où tu n'as pas envie d'être à cheval.
Le ciel se couvre, de gros nuages sombres font leur apparition, on va donc rentrer au trot pour arriver au campement avant que l'orage n'éclate. Mon cheval a de petites foulées et commence à se faire distancer par le peloton de tête. Je sens qu'il n'aime pas ça et veut rattraper, seulement l'herbe est grasse, le terrain meuble, je le retiens, me cale à la vitesse d'Anne et Ash. Tout va bien, c'est plutôt marrant de courir contre le temps, j'oublie même que j'ai mal à la tête. Tout va bien, jusqu'à ce qu'une furie me dépasse au galop en criant "tchou", nous frôlant et nous prenant par surprise mon petit cheval et moi. Ni une, ni deux, mon petit bai, partagé entre "je ne veux pas la laisser passer et je compte bien arriver avant elle" et la peur d'avoir été dépassé si subitement, s'emballe. Je ressens chez lui (et peut-être chez moi aussi) la même panique que le premier jour, lors de notre folle embardée. Sauf que cette fois-ci, nous galopons sur du gruyère. Et ce qui devait arriver arriva. Il se coince l'antérieur dans un trou, on est stoppés en pleine vitesse, je vois le sol se rapprocher tandis que j'essaie de toutes mes forces de me maintenir en arrière. Tout se passe très vite et en même temps j'ai le temps de voir toute la scène au ralenti, le temps de revoir d'Ash dire le premier soir, en attendant les nomades, qu'il y avait toujours une chute lors d'un trek, et de me dire "bon, ben ça sera moi la chute". Et comme si le temps devait récupérer son retard, tout s'accélère et je heurte le sol, à plat ventre. Avec l'élan, mon cheval bascule et me roule dessus. Le temps s'allonge à nouveau, et la roulade de mon petit bai me semble une éternité. J'ai le souffle coupé, sens chaque point de contact avec les 250kg qui me passent dessus en me demandant quand ça sera terminé. Mon cheval se relève, moi aussi. Ash descend de cheval, vient me voir, vérifie que tout va bien. Tout va bien. Je n'ai mal nul part, je ne suis pas sonnée, j'ai juste l'envie de pleurer, due au choc, que connaissent tous ceux qui se sont pris une énorme gamelle. Dembe rattrape mon cheval, il va bien lui aussi. Ash me demande de m'asseoir le temps de récupérer un peu, les autres vont rattraper le groupe de tête qui n'est pas au courant de l'incident et je retournerai tranquillement avec Ash et Dembe jusqu'au camp. Dembe prend mes rênes et me balade. Ils sont tous les deux soucieux et Ash est furieux contre la cavalière qui nous a doublés alors qu'il était interdit de le faire et qu'on devait garder le trot. Il ajoute qu'il a vu toute la chute, que c'est la croupe de mon cheval qui m'est passée dessus, que j'ai eu énormément de chance, si c'était la selle, avec les arceaux en métal, j'aurais été cassée de partout. Merci à ma bonne étoile !
Arrivés au camp, je suis l'attraction, Boldo est très inquiet, tout le monde l'est, sauf la furie qui ne se sent pas responsable et ose me dire "tu m'as vraiment fait peur". A ce moment, j'ai envie de la tuer. Pour me réconforter, j'ai le droit à un verre de vodka à boire cul sec. Paraît que c'est le meilleur remède ! 
On n'a pas le temps de grand chose que des grêlons commencent à tomber. Avec Céline, Jeanne et Marie-Astrid, on se réfugie sous la grande tente martelée par des billes de glace énormes. On y restera 20mn. 20mn pendant lesquelles le contre-coup me prend et me donne terriblement sommeil.


Je vais m'allonger une petite heure. A mon réveil, on me propose d'aller faire un tour chez les voisins. Je monte derrière Boldo, à cru, sur mon petit cheval. J'avoue que j'aurais pas aimé être toute seule dessus.
On passe la soirée à notre camp, autour du feu. La yack vodka et les chants sont encore de la partie. Et bizarrement, la vodka passe de mieux en mieux, à croire que je deviens alcoolique. On fait aussi quelques jeux sympa. 
Francis est impressionné par ma force de caractère, remise si vite de ma chute, puis également par mon calme le premier jour. Comme je lui ai dit, ce n'est pas ma première chute, ni la dernière. C'est cependant la plus belle.
Quand je repense à ce matin, à la traite des yacks, j'ai l'impression d'avoir vécu mille journées.

mercredi 28 novembre 2012

Naiman Nuur: les huit lacs

29 juillet 2012

Direction les huit lacs aujourd'hui. Les nomades et les "yackiers" se chargent d'empaqueter et d’arnacher les yacks de bât qui nous accompagneront pendant ces trois jours. Ash nous a demandé de seller, résultat on ne peut pas aider et on patiente pendant une éternité. Le chargement est impressionnant.

On crapahute dans la montagne glissante et rocailleuse, les yacks nous précédent, lents et pas très disciplinés.
En sortant des mélèzes, le ciel est chargé. Il paraît que le temps est toujours couvert par ici. Les montées et la forêt laissent place aux descentes et aux marécages.



 

























Les hautes herbes, grasses et fluo, cachent une eau mine de rien assez profonde. Mon cheval n'est pas plus à l'aise dans les marais que dans la montagne. Bizarrement, là, il n'aime pas être en tête.

Arrivée au premier des huit lacs. Ca sera notre campement pour les trois prochains jours puisque les sorties se feront en étoile (retour au camp chaque soir). Installation, déjeuner, tas de merde avec Dembe et Boldo qui joue n'importe comment et tape quand tout le monde s'y met !

On décide ensuite avec Jeanne, Céline et Marie-Astrid de profiter du lac pour faire un shampooing. Le bord du lac est tellement vaseux qu'on décide de faire une chaîne pour se passer un bol-bassine en tissu dans lequel on trempera nos cheveux. De l'eau glacée, une bolinette, un échantillon de shampooing pour quatre et du plancton = un lavage un peu douteux mais qui fait tout de même du bien. Et beaucoup de fous rires aussi !

Sieste digestive, l'établissement du camp était l'étape importante de la journée, du coup on prend vraiment notre temps. On profite de l'après-midi pour une petite balade aux alentours, voir quelques-uns des autres lacs, rendre visite aux voisins.
Retour au camp, planqués derrière une tente à jouer au tas de merde version mongole (un signe à faire au lieu de taper sur le tas), des gages et de la yack vodka que Boldo nous dit corsée. Imaginez ! Encore une belle tranche de fous rires.
Nous passerons la soirée chez les voisins.